mercredi 17 août 2011

wiki-roman-feuilleton (13/60)

La pièce était grande et inondée de jour. Une grille tenait lieu de plafond. Elle donnait sur l'extérieur. Des gens marchaient dessus sans se soucier de ce qui pouvait se passer en-dessous. On les entendaient parler. Ramaad attrapa plusieurs mots émanant d'autant de voix différentes :

Café… Situation… Je veux bien mais… Tu sais… Je n'aime pas ça… Des soldes aux… Mon conversant ne… Rien à y faire…

Il s'avança précautionneusement. Il manqua pourtant d'écraser un dos : celui d'Elikia. Assis sur un roc, recroquevillé sur ses genoux, celui-ci n'avait pas entendu Ramaad venir. Il avait l'air occupé. Il parlait tout seul. Aucun mot ne sortait.

Ramaad comprit rapidement qu'il était, lui aussi, équipé d'un champ de silence. Il ne pouvait l'entendre mais lui, non plus, ne pouvait l'entendre. Elikia était prisonnier de sa sécurité. En brouillant les écoutes il se privait lui-même de sa capacité d'écouter.

Ramaad se retira. Le champ de silence n'allait pas durer éternellement. Elikia se relèverait. Peut-être qu'en se relevant, il entamerait de brefs monologues. Les espions et d'une manière générale les gens qui ont quelque chose à cacher ont une facheuse tendance à parler tout seul. Faute de pouvoir faire confiance à quiconque, ils se rabattent sur leur propre personne.

Ramaad comptait bien exploiter cette faille. En attendant, il se posta en hauteur, à la surface d'une espèce de colonne bien amochée. Ses cheveux touchaient la grille. De temps à autre il passait ses doigts entre les barreaux.


L'air frais lui faisait du bien. Il pourrait tenir longtemps — tant que dure la conversation silencieuse d'Elikia.

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